Les fiches pratiques du droit de la prévention vous donnent une information précise et claire.
Synthèse : la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, publiée au Journal officiel le 7 août 2019, est venue poser les fondements d’une rénovation en profondeur du cadre de gestion des ressources humaines de plus de 5,5 millions d’agents publics.
Dans cette fiche seront présentées les principales mesures relatives au dialogue social (création des comités sociaux à l’instar des comités sociaux économiques du secteur privé), à la mobilité des agents, aux conditions et temps de travail, à la formation pour les encadrants et enfin les mesures en faveur de l’égalité professionnelle et des agents en situation de handicap.
Il est à noter que de nombreuses mesures visent à rapprocher les dispositions du secteur public de celles du privé (mise en place de référents handicaps par exemple).
Table des matières
2. Réorganisation du dialogue social
3. Mesures en faveur de la mobilité et de l’avancement
4. Dispositifs d’accompagnement au changement
5. Conditions et temps de travail
6. Fonctions d’encadrement et formation.
7. Mesures en faveur de l’égalité professionnelle Femmes Hommes.
8. Mesures en faveur des agents publics en situation de handicap.
La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, publiée au Journal officiel le 7 août 2019, est venue poser les fondements d’une rénovation en profondeur du cadre de gestion des ressources humaines de plus de 5,5 millions d’agents publics.
Élaborée au cours d'une année entière de concertation avec les organisations syndicales représentatives et les représentants des employeurs publics, elle a été significativement enrichie lors de son examen parlementaire (95 articles au final, contre 36 dans le texte initial) et validée sans réserve le 1er août 2019 par le conseil constitutionnel.
Cette loi se structure autour de 5 orientations principales :
Cette loi autorise le Gouvernement, dans un délai de 24 mois à compter de sa publication, à procéder par ordonnance à l’adoption de la partie législative du code général de la fonction publique. Cette codification sera réalisée "à droit constant" (à l’exception des dispositions relatives à la déconcentration des actes de recrutement et de gestion des agents publics au sein des FPE et FPH). |
Plus de 50 décrets et 7 ordonnances sont attendus pour préciser certaines dispositions de cette loi. |
Les instances du dialogue social (CHSCT(1) et CT(2)) ont été profondément réorganisées sur le modèle de ce qui existe actuellement dans le secteur privé.
L’article 4 organise donc la fusion de ces instances dans des :
Ils ont vocation à se saisir de diverses questions dont celles relatives aux « LDG », Lignes Directrices de Gestion (c’est-à-dire orientations en matière de politique RH) en matière de mutation, mobilité, promotion et valorisation des parcours professionnels.
Dans les administrations et les établissements publics dont les effectifs sont au moins égaux à un certain seuil (200 agents pour la FPT, à fixer par décret pour les autres), une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail doit être organisée au sein de ces comités sociaux.
Cet article 4 entre en vigueur au prochain renouvellement général des instances dans la fonction publique prévu en 2022.
La « formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail » peut être créée sous d'autres conditions, par exemple si l'existence de risques professionnels particuliers le justifie. Toutefois, si ces questions se posent dans le cadre plus global d'un projet de réorganisation de services alors elles seront examinées par l’instance centrale. |
(1) CHSCT : Comité Hygiène Sécurité et Conditions de Travail
(2) CT : Comité Technique
Un rapport social unique est présenté aux comités sociaux, élaboré par les administrations, les collectivités territoriales et les établissements publics et « sert de support à un débat relatif à l'évolution des politiques des ressources humaines » (article 5).
Il doit rassembler les éléments et données dont l’article 9 bis B de la loi du 13 juillet 1983 fixe une liste non exhaustive (parcours professionnel, recrutement, formation…). Ces données devront être renseignées dans une Base de Données Sociales qui devra être accessible aux membres des comités sociaux.
Le formalisme de la procédure de mutation a été simplifié (suppression de l’avis préalable des CAP -Commissions Administratives Paritaires-). De plus, une nouvelle priorité a été créée au profit des fonctionnaires qui sollicitent une mutation en leur qualité de « proche aidant » (cf. point 5.3 ci-après).
Enfin, les employeurs publics disposent de moyens juridiques pour structurer la politique de mobilité qu’ils estiment la mieux correspondre au besoin du service public (cf. notamment ci-dessous, nouvel article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984)
Article 60.I |
« L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. »
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Article 60.IV |
« Les décisions de mutation tiennent compte, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, des lignes directrices de gestion en matière de mobilité prévues à l'article 18 de la présente loi. [...] Dans le cadre de ces lignes directrices, l'autorité compétente peut, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, définir des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire. Elle peut notamment conférer une priorité au fonctionnaire ayant exercé ses fonctions pendant une durée minimale dans un territoire ou dans une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement ou au fonctionnaire ayant la qualité de proche aidant [...]. »
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Une correspondance est établie entre les crédits du CPF (Compte Personnel de Formation) du secteur public et du secteur privé, en permettant une convertibilité réciproque des droits acquis, compte tenu notamment de l’unité de compte de chacun (en euros pour le salarié /en heures pour l’agent public). Les modalités de fonctionnement du CPF seront précisées par voie règlementaire ; un décret devra notamment fixer le nombre d’heures acquises chaque année, les plafonds applicables au CPF ainsi que les modalités d'utilisation du compte épargne-temps en combinaison avec le CPF (article 58).
Une rupture conventionnelle expérimentale est mise en place pour les fonctionnaires des 3 versants, pendant une période de 6 ans (1er janvier 2020 - 31 décembre 2025). Un décret à venir prévoira un dispositif analogue pour les agents contractuels sous CDI. L’objectif de cette mise en place est de favoriser la fluidité des carrières entre les secteurs public et privé.
Cette rupture conventionnelle entraînera une radiation des cadres (ou fin de contrat, pour les contractuels), et donnera lieu au versement d’une indemnité dont le montant minimal sera fixé par décret. Cette indemnité et les modalités de la rupture conventionnelle donneront lieu à la signature d’une convention entre les parties (article 72).
Le montant de l’indemnité reçue devra être remboursé en cas de retour dans l’emploi public dans les 6 ans suivant cette rupture |
Les agents publics (fonctionnaires et agents contractuels recrutés à durée indéterminée) pourront bénéficier de l’assurance chômage lorsque leur emploi prendra fin avec leur consentement. Les agents publics qui ont démissionné dans le cadre d’une restructuration de service et bénéficié de l’indemnité de départ volontaire, ainsi que ceux qui ont signé une rupture conventionnelle disposeront donc de droits au chômage. Les conditions d’allocation seront précisées par décret (article 72).
(Par ordonnances, dans un délai de 12 à 15 mois à compter de la publication de la loi)
Dans un délai de 12 mois à compter de la publication de la loi, l’article 40 autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures visant à :
Les agents occupant des emplois présentant des risques d’usure professionnelle bénéficieront désormais d’un entretien de carrière (conditions à définir par décret en Conseil d’Etat).
Comme pour le secteur privé, le congé de proche aidant est créé dans la fonction publique. Il est accordé par période de 3 mois renouvelable dans la limite d’1 an sur l’ensemble de la carrière, lorsqu’un proche (cf. article L. 3142-16 ci-dessous concernant la notion de « proche ») présente un handicap ou une perte d’autonomie. Pendant la durée du congé, l’agent n’est pas rémunéré mais cette période est assimilée à une période de service effectif pour l’avancement et est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension.
Un décret précisera les conditions d’attribution et de gestion du congé et son extension aux agents publics contractuels.
Article L.3142-16 du code du travail
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Le salarié ayant au moins 1 an d'ancienneté dans l'entreprise a droit à un congé de proche aidant lorsque l'une des personnes suivantes présente un handicap ou une perte d'autonomie d'une particulière gravité :
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La loi prévoit que les fonctionnaires en activité bénéficient d’autorisations spéciales d’absences liées à la parentalité et à l’occasion de certains évènements familiaux dans les 3 versants de la fonction publique. L’objectif est ici d’harmoniser les règles de gestion et de mettre fin à l’hétérogénéité des situations (article 45).
La loi permet désormais aux femmes fonctionnaires allaitant un enfant de bénéficier, pendant 1 année à compter du jour de la naissance, d’un aménagement d’horaire d’1 heure maximum par jour, sous réserve des nécessités du service (droit similaire à celui existant dans le privé depuis longtemps). Un décret en définira les modalités ainsi que les possibilités d’extension aux agents publics contractuels (article 46).
Fonction Publique Territoriale :
Les régimes dérogatoires en vigueur dans la FPT sont supprimés et la durée de travail des agents territoriaux est alignée sur celle fixée par l’article L. 3121-27 du code du travail.
Article L.3121-27 du code du travail |
La durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35 heures par semaine. |
En effet, la loi vient harmoniser la durée du travail dans la FPT grâce à la suppression des régimes dérogatoires antérieurs à 2001.(1) Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics doivent être fixées par la collectivité ou l'établissement, dans les limites applicables aux agents de l'Etat, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements.
(1) Les collectivités concernées par l’abrogation d’un régime dérogatoire disposent, pour définir les nouvelles règles relatives au temps de travail de leurs agents, d’un délai d’un an à compter du renouvellement de chacune des assemblées délibérantes, soit au plus tard en mars 2021 pour le bloc communal et en mars 2022 pour les départements et les régions.
Fonction Publique d’Etat
Sans préjudice des dispositions statutaires fixant les obligations de service pour les personnels enseignants et de la recherche, la durée de travail effectif des agents de l’Etat est désormais également celle fixée à l’article L. 3121-27 du code du travail soit 35 heures[FD3] .
Fonction Publique Hospitalière
Dans les établissements publics hospitaliers, la durée du travail était déjà fixée à 35 heures par semaine depuis le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans la Fonction publique hospitalière.
Comme dans la FPE et la FPH, l’exercice du droit de grève est désormais encadré dans la FPT (article 56).
Ces dispositions organisent notamment la continuité de certains services publics locaux désignés par l’autorité territoriale (services limitativement énumérés tels que collecte et traitement des déchets, transport public de personnes, restauration collective et scolaire…).
La loi prévoit que les fonctionnaires bénéficieront désormais systématiquement de formations au management lorsqu’ils accèderont pour la première fois à des fonctions d’encadrement, l’objectif de cette formation étant d’améliorer et de professionnaliser le management des agents publics (article 64).
Les mesures contenues dans l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique sont transposées dans la loi. Elles introduisent de nouvelles obligations pour les employeurs publics des 3 versants de la fonction publique :
Au 31 décembre 2020 au plus tard, un plan d’action pluriannuel pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes doit être mis en place par l’Etat et ses EPA (Etablissements Publics Administratifs), les établissements publics de santé hospitaliers, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale de plus de 20 000 habitants (durée de 3 ans renouvelables).
Les employeurs publics sont également tenus de mettre en place un dispositif de recueil des signalements des agents qui s’estiment victimes d’un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes (modalités qui seront fixées par décret).
Les CDG (Centres De Gestion) devront mettre en place ce dispositif de signalement pour le compte des collectivités territoriales et de leurs établissements publics qui en font la demande. |
L’état de grossesse est ajouté à l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 parmi les critères de discrimination ne permettant aucune distinction entre les agents publics.
Article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. (Loi dite "loi Le Pors").
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La liberté d'opinion est garantie aux fonctionnaires.
Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. |
Parmi les autres mesures figurent :
Un nouveau chapitre intitulé « De l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés » est créé dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il reprend les dispositions des articles L.323-2 à L.323-8-8 du code du travail relatifs à l’OETH (Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés) (article 90).
Le contenu de l’OETH résultant de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel n’est pas modifié ; les missions du comité national du FIPHFP (Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique) le sont. Le FIPHFP est désormais destiné :
La composition du comité national du FIPHFP est également modifiée. Il sera désormais composé, en plus des représentants des employeurs publics, des personnels et des personnes handicapées, de représentants du service public de l’emploi.
La structuration du FIPHFP en sections (une par versant de la fonction publique) est abrogée. |
A titre expérimental, pour une durée de 5 ans, les personnes en situation de handicap bénéficiaires d’un contrat d’apprentissage pourront être titularisées dans un corps ou un cadre d’emplois correspondant à l’emploi qu’elles occupaient, sous réserve de la vérification de leur aptitude professionnelle réalisée par une commission de titularisation (article 91).
Pour faciliter le parcours professionnel des agents en situation de handicap, l’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 est modifié (article 92).
Les employeurs publics devront prendre les mesures appropriées visant à permettre aux agents en situation de handicap de développer un parcours professionnel et d’accéder à des postes de responsabilité.
De plus, des référents handicap devront être mis en place par les employeurs publics des 3 versants. Ils seront chargés d’accompagner les agents en situation de handicap tout au long de leur carrière et de coordonner les actions menées en leur faveur par leur employeur notamment en matière d’insertion professionnelle et de maintien dans l'emploi.
Le champ des bénéficiaires de dérogations aux règles normales des concours, des procédures de recrutement et des examens sont clarifiées : toutes les personnes en situation de handicap physique ou psychique, y compris celles qui ne sont pas titulaires de la RQTH (Reconnaissance de la Qualification de Travailleur Handicapé) peuvent y prétendre.
Du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025, une expérimentation est mise en place au bénéfice des fonctionnaires en situation de handicap (article 93). Une voie dérogatoire de promotion interne est créée, leur permettant d’accéder à un corps ou un cadre d’emplois de niveau supérieur par la voie du détachement sous réserve d’avoir accompli préalablement une certaine durée de services publics ( durée qui sera fixée par décret). Une commission sera chargée d’apprécier l’aptitude professionnelle des candidats à être détachés.
En dehors de ces 7 thématiques en lien avec la prévention, les conditions de travail, l’égalité hommes femmes et le handicap, la loi concerne également :