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Risques psychosociaux (RPS) - Régime applicable à la fonction publique

Date de création :
sans objet
Date de mise à jour :
août 2022

Synthèse :

Le statut de la Fonction publique reprend les définitions du harcèlement en milieu de travail figurant au Code du travail ; la jurisprudence, quant à elle, est venue compléter le régime de protection des agents victimes de harcèlement.  Les auteurs sont passibles en outre des sanctions édictées par le code pénal.

L’accord du 20 novembre 2009 sur la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique prévoit un dispositif d’évaluation et de prévention des problèmes de santé liés aux risques psychosociaux.

Textes : Code pénal, art. 222-33 et suivants

Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008

Code général de la fonction publique, art. L. 133-1 à L. 133-3

Accord du 20 novembre 2009 sur la santé et la sécurité au travail dans la Fonction publique

 

SOMMAIRE

Harcèlement au travail dans la fonction publique

Régime de protection des agents

Prévention des risques psychosociaux

 

Harcèlement au travail dans la fonction publique

Harcèlement moral

Le statut de la fonction publique interdit tout agissement (pratiques, décisions, mesures) direct mais aussi indirect (pratique apparemment neutre ayant pour but un traitement défavorable) ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail.

Le harcèlement moral peut viser toutes personnes dans les rapports de travail et n'est pas limité à l'abus d'autorité.

Selon le code général de la fonction publique, articles L. 133-2 à L. 133-3 : 

Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
 

Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un agent public en raison du fait que celui-ci :
1° A subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral,
2° A formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces faits ou agissements,
3° Ou bien parce qu'il a témoigné de tels faits ou agissements ou qu'il les a relatés.
Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder à ces faits ou agissements.

 

Harcèlement sexuel

Selon le code général de la fonction publique, articles L. 133-1 :

Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits :
a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

 

Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un agent public en raison du fait que celui-ci :
1° A subi ou refusé de subir les faits de harcèlement sexuel, y compris, dans le cas mentionné au 1° de l'article L. 133-1, si les propos ou comportements n'ont pas été répétés,
2° A formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces faits ou agissements ;
3° Ou bien parce qu'il a témoigné de tels faits ou agissements ou qu'il les a relatés.
Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder à ces faits ou agissements.

Régime de protection des agents

Protection des victimes

Les agents victimes de harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel, disposent des éléments de protection suivants :

  • Protection de la victime élargie aux témoins et à toute personne ayant relaté des faits de harcèlement ;
  • Droit d'action des syndicats représentatifs devant les tribunaux pour leur compte et pour celui des agents victimes ;
  • Nullité de plein droit de toute décision ou acte individuel pris à l'encontre de la personne qui a subi ou refusé de subir les agissements qualifiés de harcèlement dans les matières non limitatives suivantes : recrutement, titularisation, formation, notation, discipline, promotion, affectation, mutation, reclassement ou, pour les non-titulaires, rupture et renouvellement de contrat. En cas de révocation ou de licenciement, l'agent aura droit à réintégration, reconstitution de carrière et à indemnisation de l'intégralité du préjudice subi. Ce principe s’applique alors même que le comportement de la victime de harcèlement aurait nui au bon ordre et au bon fonctionnement du service public, mais à la condition que ce comportement ait été provoqué par les agissements de harcèlement dont elle aurait fait l'objet : le défaut de lien avec le harcèlement rétablit la motivation de la sanction disciplinaire (Conseil d’Etat, n° 321225, 11 juillet 2011) ;
  • Reconnaissance comme accident de service des troubles de santé liés au harcèlement à condition d'être intervenus soudainement, et, à défaut, comme maladie à caractère professionnel. Ces troubles ne sont pas inscrits au tableau des maladies professionnelles ; il incombe donc au salarié de prouver l'origine professionnelle de la maladie dont il est victime. De plus la reconnaissance, dans ce cas, de la faute de service ou de la faute inexcusable pourra donner lieu, au bénéfice de la victime, à l'indemnisation de l'intégralité du préjudice subi par la collectivité et son assureur.
  • Non considération du comportement fautif de la victime du harcèlement comme un partage des torts ; celui-ci ne saurait entraîner une diminution de son droit à réparation qui doit rester intégral (Conseil d’Etat, n° 321225, 11 juillet 2011).

Régime de la preuve

Si le statut de la Fonction publique reprend les définitions du harcèlement données par le Code du travail, il ne prévoit pas de dispositif particulier de prévention et de protection (règlement intérieur, médiation) et, en particulier, il ne prévoit pas de régime favorable quant à l'équilibre de la preuve pour la victime présumée.

La jurisprudence est venue corriger cet état de fait avec un arrêt du Conseil d’Etat du 11 juillet 2011 (Conseil d’Etat, n° 321225, 11 juillet 2011).

Cet arrêt apporte un rééquilibrage du régime de la preuve du harcèlement entre victime et auteur présumés, qui jusqu'alors incombait principalement à la personne s'estimant victime, et réalise ainsi une harmonisation avec les dispositions du Code du travail.

Selon le Conseil d’Etat :

  • il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ;
  • il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ;
  • la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
  • pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.

Sanctions

Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Les faits de harcèlement sexuel sont punis de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Ces peines sont portées à 3 d'emprisonnement et 45 000 € d'amende lorsque les faits sont commis :

1° Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions,
2° Sur un mineur de 15 ans,
3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur,
4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur,
5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice,
6° Par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique,
7° Alors qu'un mineur était présent et y a assisté,
8° Par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.

De plus, la sanction du harcèlement peut viser l'agent fautif ainsi qu'éventuellement celle de la collectivité ou de l'établissement (Code pénal, art. 222-33-1).

Le fait aggravant de discrimination 

Selon l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :

Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d'autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable.

Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.

 

Dans le cas où le harcèlement reconnu est considéré comme une discrimination, il s'opère une modification du régime juridique :

  • D'une part, la preuve de la discrimination est plus aisée à apporter par la personne qui s'en estime victime. En effet, il lui suffit d'exposer les faits laissant supposer la  discrimination et il incombe ensuite à la personne mise en cause de justifier ses décisions, ses actes et son comportement contestés. Il y a ici, au bénéfice de la victime, une véritable inversion de la charge de la preuve, alors que, pour le harcèlement moral, les faits laissant présumer une telle situation doivent d’abord être établis ce qui rend la preuve plus difficile à apporter.

Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, art. 3

Aucune personne ayant témoigné de bonne foi d'un agissement discriminatoire ou l'ayant relaté ne peut être traitée défavorablement de ce fait.

Aucune décision défavorable à une personne ne peut être fondée sur sa soumission ou son refus de se soumettre à une discrimination prohibée par l'article 2.

  • D'autre part, la sanction prévue en cas de discrimination est plus lourde :

Code pénal, art. 225-2 

La discrimination définie aux articles 225-1 à 225-1-2, commise à l'égard d'une personne physique ou morale, est punie de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende lorsqu'elle consiste :
1° A refuser la fourniture d'un bien ou d'un service ;
2° A entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque ;
3° A refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;
4° A subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ou prévue aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;
5° A subordonner une offre d'emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ou prévue aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;
6° A refuser d'accepter une personne à l'un des stages visés par le 2° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale.

Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.

  • Enfin, des sanctions complémentaires peuvent s’appliquer :
    • Sanction professionnelle : intervention de l'employeur en cas de harcèlement car est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux agissements définis comme harcèlement moral ou sexuel, (Code général de la fonction publique, art. L.133-3)
    • Sanction civile ou administrative en vue de la réparation des dommages : la responsabilité civile personnelle de l'agent auteur du harcèlement peut être engagée dans la mesure où le caractère intentionnel de la faute le prive du bénéfice de la protection fonctionnelle. Ainsi l'agent reconnu fautif pourra se voir condamné au paiement de tout ou partie des dommages et intérêts alloués à la victime.
    • L'inaction de l'administration peut également entraîner l'engagement de sa propre responsabilité en tant que personne morale pour faute de service ou faute inexcusable aux côtés de la responsabilité personnelle de l'auteur du harcèlement en vue de l'indemnisation de l'intégralité du préjudice subi par la victime. En cas d'inaction fautive, peut même se rajouter la responsabilité pénale éventuelle de l'établissement ou de la collectivité en tant que personne morale et de ses dirigeants.

Prévention des risques psychosociaux

Cet accord prévoit 15 actions regroupées autour de 3 axes prioritaires.

L'axe 2 « Objectifs et outils de prévention des risques professionnels » inclut l'action 7 « Evaluation et prévention des problèmes de santé liés aux risques psychosociaux ».

Cette action transpose dans la Fonction publique française, la position commune sur le stress dans les administrations publiques signée le 19 décembre 2008 par le réseau européen des administrations publiques et les représentants des syndicats européens de la Fonction publique. Cette partie de l'accord est pour la Fonction publique en correspondance avec l'accord national interprofessionnel (ANI) du 2 juillet 2008 applicable dans les entreprises.

Cette action 7 relative aux RPS comprend 4 propositions :

A - Proposer des méthodes et des outils d’objectivation et de prévention des risques psychosociaux.

B - Mettre à la disposition des employeurs des instruments permettant de prévenir ces risques, et définir une démarche de prévention qui pourra également porter sur la prévention des comportements addictifs (alcoolisme, tabagisme, toxicomanie etc.).

C - Définir un plan d’action national de lutte contre ces risques et le décliner localement pour assurer un dialogue social sur ces questions. Ce plan d’action fera l’objet d’indicateurs de suivi  et d’évaluation et permettra d’intégrer les risques psychosociaux dans tous les documents uniques et programmes de prévention.

D - Développer le dialogue et la connaissance sur ces questions auprès des agents et la formation des chefs de service, autorités territoriales et chefs d’établissement sur ces risques.

Ce protocole, issu de plusieurs mois de concertation puis de négociation, vise à intégrer durablement la prise en compte des RPS, au même titre que les autres risques professionnels, dans les politiques de prévention, puis d’évoluer à terme vers des mesures plus larges d’amélioration de la qualité de vie au travail (QVT). Il est accompagné de deux annexes portant d’une part sur l’octroi de moyens, en termes de temps et de formation, aux membres des CHSCT et, d’autre part, sur la médecine de prévention.

L’accord fixe un cadre commun à l’ensemble de la Fonction publique.

Il prévoit la mise en place d’un plan national d’action de prévention des RPS dans la fonction publique qui se traduira par l’élaboration par chaque employeur public d’un plan d’évaluation et de prévention des RPS. Ces plans devront s’appuyer sur une première phase de diagnostic réalisé dès 2014 et intégré dans le document unique d’évaluation des risques professionnels. La phase de mise en œuvre des plans devra intervenir au plus tard en 2015. Ces deux phases devront être réalisées sur la base d’une démarche participative impliquant l’ensemble des agents, et le CHSCT devra être étroitement associé à chaque étape.

Le protocole insiste sur le caractère primordial des points suivants :

  • la participation des agents à chaque étape du processus de mise en place des plans ;
  • le rôle et la place de l’encadrement dans la formation, initiale comme continue, à la prévention des RPS ;
  • le rôle indispensable des CHSCT dont les membres bénéficieront de 2 jours de formation dédiée à la prévention des RPS en 2014 ou 2015 (dont au moins une journée en 2014).

Cet accord constituait la première étape d’une réflexion plus large portant sur l’amélioration des conditions et de la qualité de vie au travail dans la fonction publique. En janvier 2015, un projet d’Accord-Cadre sur la Qualité de Vie au Travail dans la Fonction Publique a été rédigé mais à ce jour il n'a pas été signé par les organisations syndicales et n'est donc pas validé.

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