L'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA) éclaire les défis pour la santé mentale dans le secteur de la santé et des soins sociaux de l'UE durant la pandémie de Covid-19 et propose des stratégies pour leur prévention et gestion.
Le rapport publié par l'EU-OSHA évalue la prévalence des conditions de santé mentale liées au travail résultant de la pandémie de Covid-19 dans le secteur des activités de santé humaine et de soins sociaux (HeSCare) de l'Union Européenne (UE). Il présente les bonnes pratiques disponibles, les interventions et les recommandations de la période de pandémie de Covid-19, pour aborder les facteurs de risque psychosocial (RPS) liés au travail et la santé mentale dans ce secteur.
En termes de méthodologie, une revue systématique de la prévalence des résultats en matière de santé mentale chez les travailleurs de santé et de soins sociaux de l'UE pendant la pandémie a été effectuée.En tout, 113 études de 22 pays de l'UE ont été incluses pour évaluer la prévalence des problèmes de santé mentale dans le secteur HeSCare pendant la pandémie de Covid-19 (Annexe 1 - Études de revue systématique du rapport complet).
Remarque: les résultats de santé mentale étudiés incluaient l'anxiété, la dépression, le stress aigu, le trouble de stress post-traumatique (TSPT), les troubles du sommeil et de l'insomnie, la détresse, l'épuisement professionnel et les pensées suicidaires.
Les taux de prévalence globaux estimés dans l'UE observés dans ce rapport étaient les suivants :
- anxiété : prévalence globale (considérant tout niveau, de léger à sévère) de 37 %. Cette estimation provient de données de 41 études portant sur 35 868 participants. Lorsqu'on considère seulement l'anxiété d'intensité modérée à sévère, la prévalence estimée était de 21 % ;
- dépression : prévalence globale de 33 %, basée sur 41 études incluant 44 001 participants. Lorsqu'on considère seulement la dépression d'intensité modérée à sévère, la prévalence globale estimée était de 20 % ;
- stress aigu : prévalence globale pour toute forme de stress de 44 %, basée sur des données de 22 études incluant 19 575 participants. Lorsqu'on considère le stress aigu d'intensité modérée à sévère, la prévalence globale était de 36 % ;
- trouble de stress post-traumatique : prévalence à travers l'Europe de 24 %, sur la base de 30 études comprenant 46 867 participants ;
- détresse psychologique : La prévalence était de 46 %, basée sur 14 études incluant 16 486 participants ;
- insomnie : prévalence de l'insomnie modérée à sévère et des troubles du sommeil de 36 %, basée sur 11 études incluant 13 086 participants ;
- burnout : prévalence de 38 %, basée sur 16 études comprenant 16 128 participants ;
- pensées suicidaires : prévalence de 11 %, basée sur 6 études comprenant 17 495 participants.
L'analyse des profils professionnels spécifiques dans le secteur HeSCare suggère:
1. Des taux de prévalence plus élevés des problèmes de santé mentale chez les infirmiers, les résidents, les aides-soignants et les techniciens médicaux d'urgence (EMTs).
2. Les travailleurs de première ligne, définis largement comme ceux potentiellement en contact plus étroit avec le virus, montrent systématiquement des taux de prévalence plus élevés de charge psychologique pour toutes les conditions de santé mentale, en particulier l'insomnie, l'anxiété et l'épuisement professionnel.
3. Les travailleuses ont tendance à présenter un degré plus élevé de charge psychologique par rapport aux travailleurs masculins, notamment en termes de détresse, d'insomnie ou de troubles du sommeil, et de stress aigu.
4. Les professionnels travaillant en milieu hospitalier semblent avoir une prévalence plus élevée de problèmes de santé mentale que ceux en maisons de retraite, et une prévalence similaire à ceux en cabinets de pratique générale.
5. Si les résultats selon l'âge sont mitigés, les jeunes professionnels peuvent avoir une prévalence plus élevée de troubles de santé mentale modérés à graves.
Interventions sur le lieu de travail et exemples de bonnes pratiques
L'EU-OSHA précise que "la revue de la littérature grise nous a permis de passer en revue un grand volume de preuves, incluant 138 documents sur les interventions sur le lieu de travail et des exemples de bonnes pratiques, ainsi que 144 documents contenant des recommandations axées sur les facteurs de risque psychosociaux liés au travail et la prévention et la gestion de la santé mentale dans le secteur HeSCare pendant la pandémie (Annexe 2 —Recueil de bonnes pratiques et recommandations )". 27 modalités différentes d'interventions ont été identifiées et classées, dont les plus courantes sont le conseil, les pratiques de pleine conscience et l'utilisation de ressources numériques pour soutenir les professionnels. Des mesures telles que les espaces de repos ou les hubs, les ajustements organisationnels et la psychoéducation étaient également répandues. Les interventions/bonnes pratiques ont été classées en trois grandes catégories :
1. les interventions cognitivo-comportementales : visent à modifier les pensées, sentiments et comportements des participants dans des situations stressantes.
2. La relaxation physique et mentale : se concentre sur la réduction de l'agitation induite par le stress et la promotion du calme mental.
3. Les interventions organisationnelles : modifier les environnements de travail, les méthodes ou les ressources pour améliorer les conditions de travail.
Recommandations :
109 recommandations ont été incluses traitant du bien-être psychologique et de la santé mentale dans le secteur. Elles ont été classées en trois catégories principales, selon leur niveau d'action ou leur objectif : organisationnelles (62 recommandations), individuelles (24 recommandations) ou axées sur les résultats de santé mentale (23 recommandations).
1. Organisationnelles : soutien général, gestion des ressources, communication, horaires et charge de travail, leadership, soutien par les pairs organisationnels, soutien psychologique et gestion du stress, mesures de bien-être et d'auto-soin de l'équipe, soutien économique et stabilité de l'emploi, préparation aux futures crises, évaluation des interventions et soutien communautaire ;
2. Individuelles : soutien par les pairs, soutien psychologique, gestion du stress, auto-soin et mesures de bien-être ;
3.Axées sur les résultats de santé mentale : épuisement professionnel, TSPT, isolement et quarantaine, stigmatisation sociale et préjudice moral.